Au jour de leur mémoire nous nous demandons pourquoi un tel honneur dans l’Eglise pour ces deux saintes ? Pourquoi dans le canon romain de l’Eglise il y a ces deux noms ? Pourquoi Perpétué et Félicité et non pas Saturnin ou Saturus?
Dans l’extraordinaire éloquence de Saint Augustin nous trouvons une réponse merveilleuse[1]:
Une récompense de perpétuelle félicité: En effet, écrit Saint Augustin, Perpétue ou Perpétuelle et Félicité sont à la fois les noms de ces femmes et la récompense de tous les martyrs. Voilà pourquoi tous les martyrs plein de courage étaient prêts à lutter contre la souffrance et confesser la foi parce qu’ils étaient sur de jouir enfin d’une ‘Perpétuelle Félicité’. Reprend Saint Augustin : « De même que l’exemple de leur glorieux combat nous excite à les imiter; ainsi leurs noms témoignent de l’impérissable récompense que nous devons recevoir… Que servirait la Perpétuité sans la Félicité? et sans la Perpétuité la Félicité ne serait que passagère…».
Un martyr qualifié : Ces personnes, dit Saint Augustin, n’étaient pas seulement des personnes du sexe, c’étaient des femmes. Toutes deux mêmes étaient mères, nouvelle circonstance qui s’ajoutait à l’infirmité du sexe, pour les rendre plus sensibles à la souffrance. Voilà pourquoi les deux saintes emportèrent sur leurs compagnons la primauté dans cette fête, parce que à cause de leur sexe faible il y a eu un plus grand miracle pour vaincre l’antique ennemi; et parce qu’en combattant, la vertu des hommes avait les yeux ouverts sur la Perpétuelle Félicité.
Et maintenant déplaçons nous avec les yeux de l’imagination au lieu de martyr de Perpétue et Félicité… l’amphithéâtre de Carthage. Mgr Gourlot écrivait : « Je ne crois pas qu’il ait dans toute l’Afrique du Nord un lieu plus saint que l’amphithéâtre de Carthage, où sont tombés tant de martyrs. Leurs reliques ont été dispersées et nous ne savons pas guère où elles ont reposé, mais nous savons que dans cette arène, le sol a bu leur sang. On pourrait, comme faisait un pape dans le Colisée, ramasser une poignée de cette terre et dire « Voilà les reliques ! »[2].
Et M.V. Guérin poursuit : « Aujourd’hui, cette arène ensanglantée est retournée par la charrue ; les caveaux où l’on renfermait les bêtes féroces sont détruits et obstrués ; les gradins où se pressaient tant de milliers de spectateurs ont disparu totalement et le souvenir seul de tous les drames sanglants qui y furent joués a survécu à ce monument anéanti »[3].
Le P. Delattre, ayant commencé en 1985 à déblayer l’intérieur, a reconnu que le monument, beaucoup plus grand qu’on ne l’avait cru jusqu’à présent, atteignait les dimensions du Colisée. Cette constatation nous remet, en effet, en mémoire de la « Passio » de Saint Perpétue, où, la Martyre faisant le récite de sa vision, raconte qu’en arrivant à l’amphithéâtre, elle vit, sur les gradins, une foule immense. Pour cela le Cardinal Lavigerie écrivait le 9 Mai 1885 : « Combien je voudrais être assez riche, pour élever dans l’amphithéâtre un monument, une chapelle à la mémoire de Félicité et Perpétue et tant de Saint Martyrs ! Combien je voudrais qu’à mon défaut, quelque généreux chrétien voulut du moins le faire ».
Rentrons donc avec l’esprit dans cette chapelle, prison autrefois, et imaginons les saint martyrs ensemble en s’encouragent les uns aux autres, prêts à donner leur vie pour le Christ et la Sainte Eglise. Aujourd’hui donc c’est un jour de joie pour notre église en Tunisie et pour chacun de nous ! Saint Augustin disait : « Le retour anniversaire de ce jour nous rappelle à la mémoire et nous représente en quelque sorte le jour solennel où les saintes servantes de Dieu Perpétue et Félicité commencèrent à jouir de la félicité perpétuelle… Certes, « ils nous devancent, ils s’élèvent bien au-dessus de nous:
- si nous ne pouvons les suivre par nos actions, suivons-les en désir;
- si nous n’approchons pas de leur gloire, partageons leur joie;
- si nous n’avons pas leurs mérites, formons-en le vœu;
- si nous ne souffrons pas ce qu’ils ont souffert, compatissons;
- si nous ne nous élevons pas comme eux, tenons à eux.
«Si un membre souffre, est-il écrit, tous les autres souffrent avec lui ; et quand un membre est dans la joie, avec lui y sont aussi tous les autres». C’est la gloire du Chef divin qui veille également sur les mains et sur les pieds, sur les membres supérieurs et sur les membres inférieurs….
[1] Saint Augustin, Sermons CCLXXX, CCLXXXI, CCLXXXII.
[2] Mgr Gourlot, Saints d’Afrique, Narmura, 1930, p.42.
[3] Voyage archéologique dans la Régence de Tunis par M.V. Guérin-Tome 1, p. 37-38.
Une visite à Tebourba , toute proche, s’impose, là ou l’église érigée en période française à la mémoire des Stes Perpétue et Félicité et leurs compagnons martyrs Saturus et Saturninus …imposante église , deuxième bâtie sur les décombres de la première , bombardée pendant la 2ème guerre mondiale … Rappel , Tébourba l’héritière de l’ancienne Thuburbo Minus et ville natale de ces prestigieuses Saintes ..