L’ORIENTATION D’UNE EGLISE

L’orientation d’une église

Beau­coup d’églises sont tour­nées vers l’Orient. Elles sont orien­tées. Cette carac­té­ris­tique est sou­vent évoquée pen­dant nos visites. Quelles sont les rai­sons et la signi­fi­ca­tion de cette orien­ta­tion vers l’orient ?

Dans son sens large le verbe « orien­ter » a reçu sa signi­fi­ca­tion de l’habitude de diri­ger un édifice ou des édifices vers une direc­tion impor­tante au point de vue cos­mique ou reli­gieux Le but prin­ci­pal de cette orien­ta­tion est de pla­cer l’édifice dans l’ordre cos­mique et de visua­li­ser son empla­ce­ment à l’intérieur de cet ordre. Le plus sou­vent l’édifice est dirigé vers le Levant, où le soleil se lève, ce qui explique donc le verbe orien­ter. Cette habi­tude exis­tait déjà en Chine et aussi chez les Grecs et les Romains. De même, le porche du Temple de Salo­mon (Ezé­chiel XLIII, 1) était-il aussi dirigé vers l’orient. On connaît beau­coup de civi­li­sa­tions où les tom­beaux furent orientés.

En rela­tion avec l’orientation des édifices, l’habitude de se tour­ner vers l’orient pour la prière notam­ment lors de la prière mati­nale se retrouve. A l’époque paléo­chré­tienne, la prière mati­nale était dite, tourné vers l’orient Selon les témoi­gnages d’Eusèbe, d’Alexandrie et de saint Augus­tin, les chré­tiens se diri­geaient vers l’est pour leur prière.

Dans la doc­trine chré­tienne, le prin­cipe de l’orientation est fondé sur la lumière (donc sur le soleil) comme sym­bole du Christ. Le Christ est la lumière du monde:  » Je suis la lumière du monde, qui me suit ne mar­chera pas les ténèbres […]  » (Jean VIII, 12). On le qua­li­fie aussi de Sol lus­ti­tiae, Soleil de jus­tice (Mala­chie II, 20) ou de Sol salu­tis, soleil du salut.

La lumière marque le début de la créa­tion: « Dieu sépara la lumière et les ténèbres » (Genèse I, 4) Le Christ lui-même est la lumière, venu pour éclai­rer tout homme, comme on peut le lire dans le pro­logue de l’évangile de saint Jean (I, 9). Selon la Genèse II, 8, le para­dis ter­restre se trouve à l’est et selon les légendes antiques, l’Hadès, le royaume des morts, se trouve à l’ouest. Le Moyen Age a d’ailleurs relié le mot occi­dent avec le verbe latin occi­dere qui signi­fie  »tuer ». Aussi, le retour du Christ sur terre, à la fin du temps, est situé dans l’orient : « Comme l’éclair, en effet, part du levant et brille jusqu’au cou­chant ainsi sera-t-il à l’avènement du fils de l’homme (Mat­thieu XMV, 27; voir aussi Luc I, 78).

Depuis l’époque paléo­chré­tienne, les églises se trouvent sur l’axe est-ouest. En Grèce, en Asie mineure et en Afrique du Nord, avec peu d’exceptions, les églises furent orien­tées, avec leur abside tour­née vers l’orient, à par­tir du V° siècle. En Occi­dent, il y avait aussi un bon nombre d’églises dont l’entrée était orien­tée, parmi les­quelles trois des quatre basi­liques majeures (Saint-Sauveur [= Saint-Jean-du-Latran], Saint-Pierre et Sainte-Marie Majeure à Rome). Au cours du Haut Moyen Age, l’orientation du che­vet des églises gagna de plus en plus de ter­rain et aux XIème et XIIème siècles, ce prin­cipe était devenu une règle quasi géné­rale. Des cir­cons­tances par­ti­cu­lières, comme par exemple la situa­tion du ter­rain, ont pro­vo­qué quel­que­fois des exceptions.

Le sym­bo­lisme rela­tif à la lumière retrouve aussi son expres­sion dans l’élévation des églises : sou­vent la par­tie orien­tale est la par­tie la plus illu­mi­née de l’édifice. Dans cer­taines églises, la fenêtre axiale du côté orien­tal est plus grande que les fenêtres voi­sines. Dans cer­tains livres, on lit que l’orientation retrouve son sens à cause de la situa­tion de Jéru­sa­lem à, se trou­vant à l’orient. Cette inter­pré­ta­tion le semble très dou­teuse. Je n’ai trouvé aucune men­tion ancienne qui jus­ti­fie cette hypo­thèse. Mais peut-être y a-t-il des per­sonnes qui ont trouvé d’autres expli­ca­tions. N’hésitez pas à les signa­ler ! 

SOURCE/ Jeroen Wes­ter­man
CASAinfo n°58

NOTES :
1. Pour les lati­nistes le latin connaît deux verbes occi­dere qui sont très proches L’un (occi­dere, occidi, occi­sum) signi­fie « détruire, tuer », I’autre (occi­dere, occidi, occa­sum) veut dire « tom­ber« 
  2. Contrai­re­ment à ce qu’on répète sou­vent, nous ne savons rien sur l’état d’origine de la basi­lique de Véze­lay rien ne per­met d’affirmer que le chœur roman était plus clair que la nef. L’église de Véze­lay n’est pas par­fai­te­ment orien­tée non plus Par contre, il est évident que le sym­bo­lisme solaire joue un rôle important.

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